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De la naissance de « l’appareil à penser »
à la consultation…

Par Benedicte Flieller, Sophrologue, France

De la naissance de « l’appareil à penser » à la consultation…

«Le petit enfant souffre des affres de la faim et de la peur de mourir, il est tiraillé par la culpabilité et l’angoisse et poussé par l’avidité, il se salit et pleure. La mère le prend dans ses bras et le console, et le petit enfant finit par s’endormir.» (W. R. Bion, 2004)

Le modèle contenant-contenu :

Dans la relation mère-bébé, le modèle contenant-contenu peut être employé pour représenter aussi bien la réussite que l'échec de l'identification projective. Lorsque la mère et l'enfant sont ajustés l'un à l'autre, l'identification projective est utilisée par le nourrisson pour éveiller chez la mère des sentiments dont il veut se débarrasser. Ainsi, le nourrisson, lorsqu'il est angoissé parce qu'il a faim, peut se mettre à crier ou à pleurer.
Si sa mère peut le comprendre et agir en fonction de la demande de l'enfant, l'enfant a le sentiment qu'il s'est débarrassé de quelque chose d'insupportable dans sa mère, et que celle-ci en a fait quelque chose de supportable. 
La mère fonctionne alors comme un contenant des sensations du nourrisson et, par sa maturité psychique, assure le rôle d'un bon objet qui transforme la faim en satisfaction, la solitude en compagnie, ainsi que la peur de mourir et l'angoisse en vitalité et en confiance, l'avidité et la méchanceté en sentiments d'amour et de générosité. 

Comment cela fonctionne-t-il ?

Le petit bébé a faim, il se met à pleurer. Son psychisme n’est pas encore assez élaboré pour contenir et traiter les émotions et les sensations. En ressentant les affres de la faim, le petit bébé peut être littéralement submergé de vécus d’une violence extrême. Avoir faim, c’est comme être dévoré par une bête sauvage qui vous arrache le ventre. Ces « vivances émotionnelles » comme les appellent Bion ne sont pas représentables pour le bébé puisqu’il ne peut pas mettre des mots sur ce qu’il ressent. Bion a nommé ces vécus excessifs "éléments β (bêta)".
La mère va répondre au besoin de l’enfant en lui préparant un biberon, en le rassurant. Par exemple elle va dire à son bébé :

« Ne t’inquiète pas, je te prépare un biberon, une fois que tu auras mangé cela ira beaucoup mieux… »

En disant cela, la mère peut s’identifier au vécu de son bébé, grâce à son appareil psychique élaboré, elle peut prendre en charge les vécus terrifiants de l’enfant les traiter et lui rendre sous une forme « détoxiquée». Ce n’est plus un vécu terrifiant, cela s’appelle la faim et tout le monde la ressent chaque jour. Bion dit qu'elle a transformé les éléments bêta de l'enfant en "éléments α (alpha)", c'est à dire en vécus délimités par une forme, une image. Bion appelle cela « la capacité de rêverie de la mère ».
Peu à peu, au fil des interactions mère-bébé, le petit enfant va se sentir sécurisé face à ses contenus émotionnels et corporels. Peu à peu il va intérioriser le mécanisme et son « appareil à penser » va se construire progressivement.

En consultation

Le thérapeute, dans sa position d’acceptation inconditionnelle propose au patient un espace psychique d’accueil, similaire à la « capacité de rêverie de la mère ». Il ressent les vécus douloureux de son patient (éléments bêta), grâce au cadre établi, il est soutenu dans sa démarche. En reformulant, en synthétisant le thérapeute restitue à l’autre ses vécus. Le contenant psychique du patient est ainsi au fil des séances renforcé, le patient peut ainsi dans ce cadre de sécurité transformer lui-même ses éléments bêtas en éléments alpha. Même si au cours de la séance le patient est submergé par ses émotions, il sait que grâce au cadre établi, cela est permis. En sortant il pourra parfaitement se contrôler, et retrouver ses forces. La séance devient une métaphore de l’espace psychique où le patient pourra déposer ses éléments bêta et les transformer en éléments alpha.
Au fil des séances de plus en plus sécurisé, le patient pourra accepter plus facilement ses difficultés, ses vécus bruts et chaotiques. Ces derniers, reconnus, nommés, analysés et interprétés n’auront plus besoin de s’exprimer par des symptômes invalidants.

Par Benedicte Flieller, Sophrologue, France
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