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Psychothérapie et activités
réservées : la loi enfin adoptée!
Chers(ères) collègues,
Je suis très heureuse de vous annoncer que l’Assemblée nationale a finalement adopté le projet de loi no 21 et qu’aucun amendement concernant les psychologues n’y a été apporté. Rappelons que cette loi modernise les champs d’exercice de plusieurs professions de la santé mentale et des relations humaines et leur réserve des activités à haut risque de préjudices pour la population. Il s’agit des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux, des conseillers d’orientation et des psychoéducateurs, des infirmières, des ergothérapeutes, des médecins et bien sûr, des psychologues. Vous pouvez d’ailleurs consulter le projet de loi no 21 sur le site de l’Ordre (www.ordrepsy.qc.ca).
Son entrée en vigueur sera progressive comme cela a été fait pour le projet de loi 90. Selon l’Office des professions, ce sont les dispositions concernant la psychothérapie, l’évaluation des troubles mentaux et l’évaluation des troubles neuropsychologiques qui prendront d’abord effet.
L’un des principaux objectifs visés par cette loi était de mettre fin au chaos régnant dans le secteur de la psychothérapie. Ainsi, toute personne autre qu’un psychologue ou un médecin qui voudra exercer la psychothérapie et porter le titre de psychothérapeute devra être membre d’un ordre professionnel de la santé mentale et des relations humaines, démontrer qu’elle rencontre les conditions et les exigences de formation théorique et pratique nécessaires et détenir un permis délivré par l’Ordre des psychologues.
Avant d’étudier les demandes et d’émettre les permis de psychothérapeute, l’Ordre devra attendre que l’Office des professions ait adopté un règlement prévoyant, entre autres, les critères d’admission déjà identifiés au rapport Trudeau. Quant à la qualité de la pratique, l’Ordre continuera d’assurer la surveillance de l’exercice de la psychothérapie par ses membres ainsi que celle des psychothérapeutes qui détiennent déjà les compétences requises, mais qui ne sont pas admissibles à un ordre professionnel (PCNA, droits acquis). Les autres ordres professionnels concernés se porteront garants de la compétence de leurs membres exerçant la psychothérapie. Cependant, toute poursuite pénale pour exercice illégal de la psychothérapie ou pour usurpation du titre de psychothérapeute sera intentée par l’Ordre des psychologues du Québec.
Des activités réservées
L’Ordre a toujours été d’avis que la définition que donnait le rapport Trudeau de l’évaluation des troubles mentaux rencontrait l’objectif de donner accès aux traitements et ainsi d’augmenter l’accessibilité. Certains d’entre vous se sont questionnés, considérant que le mot évaluation pouvait avoir une portée clinique moindre que le mot diagnostic. L’annonce faite par Me Kathleen Weil, ministre de la Justice, et par le Dr Yves Bolduc, ministre de la Santé, peut nous rassurer à cet égard. En effet, une directive administrative du ministère de la Santé sera modifiée de sorte que l’évaluation d’un psychologue concluant à la présence d’un trouble du spectre de l’autisme donnera accès au traitement non pharmacologique, ce qui, jusqu’à maintenant, exigeait un diagnostic médical. Il faut donc en conclure que le mot importe moins que le sens que la loi lui donne. Cela étant, rien ne nous empêche de continuer à utiliser l’expression diagnostic psychologique dans nos communications, conformément à l’état du droit actuel.
En ce qui concerne les troubles des apprentissages (lecture, expression écrite, calcul) et de la communication (langage), il est sans équivoque qu’au terme de ce dernier exercice législatif, l’Ordre des orthophonistes et audiologistes du Québec ne pourra plus soutenir que ses membres sont les seuls professionnels compétents et mandatés par la loi pour en faire l’évaluation, conclure à leur présence et en communiquer les résultats. Ceci mettra donc un terme à la confusion régnant dans les différents milieux, particulièrement dans les milieux scolaires.
La réserve aux psychologues de l’évaluation des troubles neuropsychologiques ainsi que celle des troubles mentaux n’aura pas pour effet d’empêcher tout autre professionnel d’exercer les activités qui relèvent de son champ de compétence. L’orthophoniste, par exemple, continuera d’exercer toutes ses activités dont l’activité qui lui est réservée soit « évaluer les troubles du langage, de la parole et de la voix dans le but de déterminer le plan de traitement et d’intervention orthophonique». L’inverse est aussi vrai : l’orthophoniste ne peut empêcher le psychologue d’exercer sa profession. Mentionnons que le législateur a ajouté une disposition au projet de loi 21 justement pour que la réserve d’une activité à une profession n’empêche jamais un autre professionnel d’exercer la sienne, une clause s’appliquant à tous les professionnels. Les psychologues, les orthophonistes et les orthopédagogues travailleront de concert dans le respect de leurs compétences.
Il ne faudra jamais oublier que l’objectif de cette loi est d’augmenter l’accessibilité aux ressources compétentes. C’est parce que les ordres concernés ont compris que l’interdisciplinarité est la voie de l’avenir qu’ils sont parvenus à un consensus sans précédent. Nous sommes tous clairement invités à sortir des silos professionnels dans lesquels nous nous enfermons trop souvent, afin de mettre au service de la population que nous desservons toutes les expertises propres à chacune de nos professions ou spécialités.
C’est ainsi que, pour éviter que la loi ne soit interprétée différemment selon les uns et les autres et pour faciliter son application, il a été convenu qu’un guide explicatif commun suivrait l’adoption du projet de loi 21. Il sera élaboré par tous les ordres professionnels concernés, en collaboration avec l’Office des professions. Ce guide permettra aux professionnels et aux ges-tionnaires d’avoir des réponses concrètes aux questions qui surviendraient dans l’application d’un nouveau cadre législatif en lien avec la réalité de leur milieu.
La profession de psychologue a franchi une étape historique. Nous pourrons et devrons mettre toutes nos compétences au service du public québécois. Nous devrons aussi connaître et respecter les compétences des autres professionnels. C’est en travaillant ensemble, les différents ordres professionnels concernés, que nous sommes arrivés à des propositions qui font consensus. C’est en travaillant ensemble, sur le terrain, que les différents professionnels développeront de plus en plus des liens harmonieux. C’est aussi de cette manière que chacun trouve une plus grande satisfaction dans son travail. Le degré de participation à un projet commun est, on le sait, en forte corrélation avec le bonheur. Soyons des psychologues heureux!
Rose-Marie Charest, présidente
Ordre des psychologues du Québec
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