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Qu'est ce que la méditation? Définitions et variété des techniques.

Par Alain Rioux Ph. D, Psychologue  |   Voir ma page Psycho-Ressources 
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Introduction

La pratique de la méditation remonte à plus de 3000 ans en orient. Selon Walsh (1992), des fresques vieilles de 4000 ans représentant des personnages assis dans des postures de méditation ont été retrouvées sur les murs des cavernes indiennes. En occident, l’histoire de la recherche sur la méditation n’a guère plus de 75 ans. C’est un domaine d’étude controversé qui suscite des résistances mais alimente aussi la curiosité des chercheurs. En survolant l’histoire de la recherche sur ce thème en Amérique du nord, nous avons identifié certaines limites et difficultés qui sont liées aux aspects culturel et historique de la méditation. Premièrement, il existe de nombreuse techniques de méditation qui ont des liens étroits avec les traditions religieuses dont elles découlent. De plus, les descriptions ancestrales sont souvent subjectives et varient avec le vocabulaire des auteurs qui est aussi très différent du vocabulaire de la recherche empirique. Finalement, les phénomènes qui se produisent dans la méditation sont difficilement reproductibles, tout comme les résultats des différentes  études dans lesquelles on ne prend souvent pas le soin de décrire précisément la technique dont il est question.

La variété des techniques

Les différentes techniques de méditation peuvent être classées selon le type d’exercice mental qu’elles nécessitent ou selon leur orientation vers une conception d’un Dieu (Goleman, 1977). Il existe deux types de méditation correspondant à des exercices mentaux très différents. Les méditations de type concentration ont pour but de faire converger le flot des pensées en fixant l’esprit sur un seul objet, le thème de la méditation. L’objet de concentration peut être un mantra, comme dans le cas de la méditation transcendantale (voir le tableau ci-dessous), un texte sacré ou le mouvement de la respiration. L’essence de la méditation de concentration est la non-distraction à travers laquelle le pratiquant apprend à développer une vision claire et unique. Le second type est la méditation introspective (mindfulness, insight meditation) dont l’exercice principal consiste à observer tous les phénomènes de l’esprit et à développer la position de témoin. Il existe, finalement, un troisième type de méditation qui marie les techniques de concentration et d’introspection et que l’on nomme méditation mixte ou intégrée. Ici, le méditant débute une séance par la pratique de la concentration jusqu’à ce qu’il ait atteint un certain niveau de détente physiologique. Il poursuit la session en élargissant son attention au flot de ses pensées, sensations et perceptions. Il devient l’observateur des différents phénomènes de la conscience. Les techniques de méditation Vipassana de la tradition bouddhiste tibétaine et Zazen de la tradition Zen peuvent être considérées comme des techniques mixtes (voir le tableau ci-dessous).

Classification des traditions et techniques de méditation (adapté de Goleman ,1977)

Tradition

Technique

Théistes / Non-théiste

Type d’exercice mental.

Bouddhiste tibétain

Vipassana

Non-théiste

Mixte

Zen

Zazen

Non-théiste

Mixte

Krisnamurti

Connaissance de soi

Non-théiste

Introspection

Méditation transcendantale

Méditation transcendantale

Non-théiste

Concentration

Hésychasme chrétien

Prière du cœur

Théiste

Concentration

Raja Yoga

Samadhi

Non-théiste

Concentration

La deuxième façon de classer les différentes techniques de méditation porte sur leur orientation vers une conception d’un Dieu. Certaines techniques relèvent de traditions théistes dans lesquelles la méditation permet au pratiquant de tendre vers l’unité, c’est-à-dire de ne faire qu’un avec Dieu (Voir tableau ci-dessus. Dans ces traditions, des règles de vie très strictes peuvent accompagner la pratique de la méditation. L’abandon des possessions individuelles, le retrait graduel de la vie sociale, la fréquentation des disciples de la même tradition en sont quelques exemples. Dans les traditions non-théistes (voir tableau ci-dessus), la méditation amène le pratiquant vers le zéro, vers l’épuisement des fonctions mentales. Toutes les pratiques non-théistes proclament l’observation des processus mentaux comme la base du développement de la conscience. Il n’y a pas de règles de vie strictes même si certaines traditions encouragent le développement d’une attitude de simplicité et d’humilité dans le quotidien. Les interactions sociales et les activités quotidiennes sont autant de moments privilégiés pour poursuivre l’observation de soi.

La question de la définition

Il y a en général deux grands types de définitions de la méditation. Premièrement, il y a celles qui l’associent à une technique d’auto-régulation au même titre que la relaxation musculaire ou le biofeedback (Snaith, 1998). Ce type de définition est quelquefois réductif et ne semble pas rendre justice à toute la richesse du processus méditatif. Puis, il y a les définitions qui relient la méditation à une forme de quête spirituelle (Desjardins, 1992). Dans ce cas, le vocabulaire est souvent éthéré et subjectif, ce qui nous donne l’impression de ne pas savoir exactement de quoi il s’agit. Afin de refléter la richesse de la méditation et de conserver une certaine objectivité nous retiendrons la définition de Craven (1989) qui la situe dans son contexte culturel :

« La méditation réfère à un groupe de techniques reconnues comme permettant de rehausser certaines habiletés telles la concentration, la régulation des états conscients et la conscience de soi. Les techniques de méditation sont traditionnellement enchâssées dans la psychologie de la conscience de certaines disciplines comme le Bouddhisme et le Yoga et sont utilisées pour favoriser le développement personnel et la croissance spirituelle. Ainsi, la méditation a été plus intimement associée au système des croyances religieuses et philosophiques de l’Inde et de l’est de l’Asie. » (Craven, 1989, p.648). 

Nous retiendrons aussi que la méditation peut être définie de manière plus spécifique comme « un ensemble de techniques qui ont en commun de tenter consciemment de fixer l’attention d’une manière non-analytique et d’éviter de s’attacher à des pensées discursives ou ruminatives. » (Shapiro & Walsh,1984, p. 6). Cette dernière définition décrit la méditation à l’extérieur d’une quelconque forme de quête spirituelle.

La méditation est l’une des plus vieilles formes de thérapie (Walsh, 1992). En orient, l’origine de sa pratique se perd dans l’antiquité. La plupart des textes d’origine regorgent de termes indiens et sanskrits, cette langue sacrée et littéraire de la civilisation brahmanique (environ 800 à 600 ans avant Jésus-Christ). Ces textes ont été rédigés par des moines ou des maîtres spirituels mais la majeure partie de la transmission des connaissances sur la méditation s’est effectuée par tradition orale et par l’enseignement des maîtres aux disciples. Ainsi, l’esprit du chercheur occidental est souvent insatisfait par les connaissances contenues dans les textes sacrés. Il s’agit d’une matière qui repose sur l’expérience, l’intuition et l’introspection plutôt que sur la démarche scientifique (Wilber, 1980). Même si la voie de l’introspection des mystiques orientaux repose sur une tradition rigoureuse qui est le fruit de quelques milliers d’années d’évolution, le chercheur occidental a souvent l’impression d’être en eaux troubles lorsqu’il aborde cette matière qui ne répond pas aux critères de la voie empirique.

Conclusion : Les voies de la connaissance 

L’histoire de l’étude scientifique de la méditation a environ 75 ans alors que l’enseignement de cette pratique se transmet de maîtres à disciples depuis plus de 3000 ans. A notre avis, il ne fait pas de doute que la recherche sur la méditation en est à ses débuts et qu’il faudra surmonter plusieurs défis pour qu’elle continue de progresser. Il faut aller au-delà de la simple technique d’auto-régulation et avoir l’ouverture d’observer des phénomènes qui peuvent nous paraître marginaux, bizarres ou carrément douteux d’un point de vue scientifique. Pour approfondir nos connaissances des phénomènes mystiques, Wilber (1980) propose trois voies d’investigation qui sont, selon lui, les voies universelles de la connaissance. Premièrement, il y a l’empirisme: c’est la voie qui s’intéresse aux faits et aux données. En psychologie transpersonnelle, elle se concrétise dans l’étude des effets physiologiques de la méditation et s’intéresse particulièrement à la reproductibilité des phénomènes. Deuxièmement, il y a la voie de la logique qui est celle des grands théoriciens. Le modèle d’actualisation de Maslow et la psychanalyse de Freud sont des exemples fascinants de théories fondées sur la logique qui ont permis d’approfondir notre connaissance de la nature humaine. Puis, troisièmement, il y a la voie de l’introspection qui s’intéresse au développement, à la croissance et à la connaissance de soi. C’est la voie de la psychothérapie, de la méditation et de toutes les techniques d’exploration individuelles et de groupe qui s’intéresse à la quête de sens, au spirituel. C’est une voie qui est concernée par la recherche de la vérité. A notre avis, c’est sur le chemin de chacune de ces voies que nous devrons progresser pour comprendre un peu plus ce qu’est la méditation et comment elle peut être utile à notre épanouissement collectif.

Bibliographie                                                                                       

Craven, J. L. (1989). Meditation and Psychotherapy. Canadian Journal of Psychiatry, 34, 648-653. 

Desjardins, A. (1989). Approches de la méditation. Paris : Édition de la Table Ronde.

Goleman, D. (1977). Douze formes de méditation. Paris : Fayard.

Maslow, A. (1970). The Father Reaches of Human nature. The Journal of Transpersonal Psychology, 1, 1-9.  

Shapiro, D. H., & Walsh, R. N. (1984). Meditation: Classic and Contemporary Perspectives. New-York: Aldine Publishing Company. 

Snaith, P. (1998). Meditation and Psychotherapy. British Journal of Psychiatry, 173, 193-195. 

Walsh, R. (1992) The Search for Synthesis: Transpersonal Psychology and the Meeting of East and West, Psychology and Religion, Personal and Transpersonal. Journal of Humanistic Psychology, 31(1), 19-45. 

Wilber, K. (1980). The Pre-Trans Fallacy. Re Vision, fall .

 

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