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. Au fond d’eux-mêmes où ils le cachent les hommes sont malheureux. Certains recherchent l’amour, espérant un baume à leur souffrance mais s’en détournent lorsqu’ils le rencontrent, soit parce qu’ils ne l’ont pas reconnu, soit parce que leur peur augmente d’avoir à déposer le sac qu’ils portent pour l’accueillir. D’autres se tournent vers son inverse, la haine, justifiant sa violence par leur colère à se sentir privé de ce qui, pensent-ils, doit leur revenir de droit. Mais tous espèrent, d’une façon ou d’une autre, l’expérience exaltante qui leur permettra d’échapper à la futilité de leur existence et à la désertification intérieure qu’ils éprouvent. Mais comment peuvent-il reconnaître ce qu’ils attendent, vu qu’ils ont limité leur idée de l’amour à des formes personnelles et particulières et le confondent avec ses substituts ? Ainsi passent-ils à côté de sa véritable signification. Sait-on seulement ce que signifie l’amour ? Pour tenter d’y répondre, la réflexion s’impose : « La compréhension n'est autre que l'appréciation, parce que tu peux t'identifier à ce que tu comprends et, en en faisant une partie de toi, tu l'acceptes avec amour. C'est comme cela que Dieu Lui-Même te créa : dans la compréhension, dans l'appréciation et dans l'amour » (1) . Autrement dit l’amour s’éprouve en s’identifiant à ce qui est apprécié – mais la compréhension est d’abord nécessaire. C’est pourquoi, avant de s’apprécier et de s’aimer, les hommes doivent commencer par se comprendre. Et, pour se comprendre, chacun doit admettre que sa compréhension repose sur une décision de son esprit et non sur une interprétation impulsive basée sur ses émotions. Pour comprendre quoi que ce soit, un sens doit lui être donné ; or, lorsqu’une chose quelconque a du sens, c’est que sa cause est intelligible ; elle peut alors être reconnue et nommée. Mais ce processus réflectif de la pensée dépend d’une décision que seul l’esprit de celui qui se veut « passant » peut prendre. Car ici, au cours de sa traversée, le passant devra apprendre à surmonter ce vieux cliché galvaudé et fatigué qui réduit l’amour à son expression physique et fait que les images constamment dupliquées du corps sexué lui tiennent lieu de modèle. L’amour perd son sens dès qu’il est confondu avec le plaisir que procure le corps et en devient le substitut. Et jamais personne n’a pu donner de sens aux substituts, ce qui fait qu’il est inutile de chercher à se comprendre sur ce terrain là car non seulement les relations qui ont pour seul objectif la gratification des sens détournent le sens de l’amour, mais leur nature hautement personnelles et donc émotionnelles les rend, parce qu’elles sont changeantes et instables, littéralement incompréhensibles. Le malheur des hommes vient du fait qu’ils se sont privés d’amour, qui par définition est impersonnel, pour s’identifier à leur image personnelle et corporelle. C’est elle qu’ils aiment finalement, et plus particulièrement leur fonction sexuelle génitrice, qui fait d’eux des substituts de Dieu car ils espèrent faire bénéficier leur moi de Ses attributs – bien qu’ils payent un prix élevé pour racheter leur culpabilité. Pour compenser leurs échecs répétés, leur culpabilité et la peur qu’ils ressentent, ils n’ont d’autre option, croient-ils, que d’inverser le sens de l’amour, qui est bonheur, en plaisir des sens. La croyance au particularisme, fondée sur le dogme de la séparation, établit que chaque individu est une entité autonome et singulière, dont la volonté (fonction de l’esprit) lui est propre ; que son indépendance est prouvée par son moi particulier, représenté par son corps psychique et physique, ce dont témoigne incontestablement son histoire personnelle ; que sa souffrance et ses nombreuses cicatrices prouvent sa « réalité » puisque, selon lui, son état de victime et sa souffrance valident son expérience psycho-corporelle. Les hommes sont malheureux parce qu’ils détournent l’Amour de sa fonction unificatrice spirituelle et lui préfère des substituts qui légitiment leur existence séparée. Ainsi sont-ils obligés de rêver d’illusions car, en vérité, l’esprit ne peut se séparer de l’Amour qui est sa substance même. Dans l’Absolu de la vérité, la communion est le mode opératoire de l’Esprit. Dans ce Tout aimant, la compréhension et l’appréciation sont synonymes d’unité et d’Amour, parfaitement et immuablement connus. Les Éveillés de tous les temps en ont témoigné. Les endormis, les rêveurs de leur monde particulier, qui désirent cependant s’éveiller au monde d’amour et de paix intérieure que seul l’état-un de l’esprit peut leur offrir, ont un impérieux besoin d’apprendre que l’union dont il est question ne peut se produire au niveau des formes matérielles dont leur rêve individuel est fait. L’investissement dans ces formes particulières, que suppose le fait même de rêver et qui leur donne la fausse impression d’exister individuellement, est tel qu’ils préfèrent généralement en souffrir en les revendiquant que de s’éveiller en y renonçant. C’est pourtant à cette inutile revendication que s’efforcent tant de bonnes volontés, alors qu’ils retiennent dans leurs poings serrés la clé de leur délivrance. Par leur attachement à leur singularité, les hommes n’ont pas consciemment accès à l’unité de l’esprit, qui est la réalité, et donc à la communion, qui en est l’état. Ainsi n’ont-ils d’autre choix que de dialoguer entre eux par le biais du langage pour apprendre et comprendre qu’ils ne sont pas différents les uns des autres ; qu’ils ne sont ni hommes ni femmes, ni Blancs ni Noirs, ni Asiatiques, Américains, Européens ou même Homo Sapiens, et que les différentes religions auxquelles ils s’identifient, n’étant aussi que des formes, ne peuvent chacune représenter un Dieu différent. Pour
qu’Il soit intelligible, l’Esprit de Dieu doit être Un. Et la Tour de Babel, symbole de la punition du dieu vengeur qui voulait séparer les hommes en multipliant les langues pour les empêcher de se comprendre, s’écroule sur ses fondations usées, comme toutes les structures, murs et autres frontières qui séparent et emprisonnent. |
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Par
Michèle-Rose Wainhouse Note: (1) A Course in Miracles, T. 7-V. |
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