Les grandes questions à la lumière du bon sens et de la raison.
Par René Lavernhe
Auteur du livre: « Connaissance de soi par la symbolique de l’homme triangle » Editions Castelli – Mars 2015
– https://aws.psycho-ressources.com/blog/connaissance-de-soi-homme-triangle/
«Le bon sens est la chose du monde la mieux partagée.» (Descartes)
«Je festoie et caresse la vérité en quelque main que je la trouve, et m’y rends allégrement, et lui tends mes armes vaincues d’aussi loin que je la vois approcher.» (Montaigne)
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«Notre vie se partage entre les convulsions de l’inquiétude et la léthargie de l’ennui» affirme le grand Voltaire.
«Les hommes courent après l’amour puis après l’ambition et ne trouvent une assiette plus tranquille que quand ils meurent» nous dit La Bruyère.
Affirmations bien raides qui n’incitent pas à l’optimisme mais détiennent une grande part de vérité. Et quand l’homme dans sa course perpétuelle se libère un moment de repos pour «faire le point», s’élever au-dessus du quotidien, les grandes questions se présentent à lui immanquablement:
«Qu’est ce que je fais sur Terre? Quel est le sens de la vie? Qui sommes-nous? D’où venons-nous? Où allons-nous?»
En réponse à ces questions légitimes et fondamentales: Le silence de la nuit profonde, l’incertitude, le désarroi.
Candide en proie à l’angoisse métaphysique interroge Martin: «Mais à quelle fin ce monde a-t-il donc été formé? Pour nous faire enrager répond Martin»
Tragique condition humaine: Le mieux n’est-il pas de profiter des bons moments de la vie sans chercher à comprendre?…
Les grandes questions demeurent: Les mystères de l’univers, de la vie, de la mort, d’un au-delà hypothétique nous préoccupent malgré nous. Se voiler la face n’est pas la solution humaine:
«Plus fort que tous les échecs et tous les raisonnements nous portons en nous l’instinct que, pour être fidèle à l’existence, il faut savoir, savoir toujours plus, et pour cela chercher, chercher toujours davantage, nous ne savons pas exactement quoi, mais quelque chose qui, sûrement, un jour ou l’autre pour ceux qui auront sondé le réel jusqu’au bout apparaîtra.» (Theillard de Chardin)
«Il faut aller à la vérité avec toute son âme» (Platon)
Au soir d’une vie de recherche personnelle, à la lumière du bon sens et des acquis de la Science, je suis parvenu à quelques réponses que je me permets d’exposer ici.
1) RÉPONSE DU BON SENS: LA CERTITUDE DES ÉVIDENCES.
Qui sommes-nous? Des singes
Quel est le sens de la vie? Nous reproduire.
«J’aime les paysans ; ils ne sont pas assez savants pour raisonner de travers» dit Montesquieu. Ils ont les pieds sur Terre et connaissent le côté matériel de la vie.
Comme eux ayons le courage de regarder la réalité en face même si cela froisse notre amour-propre:
«L’homme est un singe culotté» nous dit Diderot.
«Un singe avec un gros cerveau» précise Darwin.
L’homme est fait de matière; c’est un mammifère; son corps est très semblable à celui des chimpanzés avec qui il partage la majorité de ses gènes. Soumis aux lois de la nature comme tous les êtres vivants il a des besoins organiques et ses instincts sont semblables à ceux des bêtes.
«L’instinct de lutte et l’instinct sexuel sont les deux instincts primordiaux de l’homme» nous dit Freud.
Bien sûr nous sommes munis d’une intelligence supérieure à celle des autres animaux avec émergence de la parole, de la pensée spéculative, du raisonnement, facultés multipliées par l’éducation et nous profitons des bienfaits de la civilisation.
Reconnaissons pourtant qu’il y a au fond de nous-mêmes l’animal tapi qui reste silencieux tant que ses besoins sont satisfaits mais qui devient farouche quand il n’a pas ce qu’il lui faut ou qu’il est agressé.
«L’homme est un loup pour l’homme» en même temps qu’un singe lubrique.
La nature commande vigoureusement à tous les êtres vivants: «Accouplez-vous tant que vous pouvez, multipliez-vous le plus possible et vous serez heureux; vous êtes nés pour vous reproduire. Il y aura du gâchis dans la descendance mais ça n’a pas d’importance: Les forts et les chanceux vivront, les faibles périront pour le plus grand bénéfice de l’espèce».
La vie n’est pas tendre ni avare d’elle-même. Nous sommes les jouets conscients ou pas d’une vaste machination de la nature et les grandes satisfactions de l’existence sont liées à celles de nos besoins vitaux.
Après les folies de la jeunesse, quand il a pris de la maturité, l’homme ressent le besoin d’assurer sa descendance. Cela devient son but, la grande affaire de son existence. Et quand il rencontre l’âme sœur, que les enfants naissent, les parents tendrement amoureux jouissent d’un bonheur sans tache, rêvent d’un avenir radieux…
Ceci nous amène à prendre du recul pour mieux percevoir le déroulement et le sens de cette perpétuelle succession des êtres vivants.
2) RÉPONSE DE LA SCIENCE: L’ÉVOLUTION.
Élevons-nous à l’échelle de l’univers et de l’immensité des temps cosmiques:
La Science a prouvé que l’univers n’est pas statique comme on le croyait au 19ème siècle. Il a débuté par une gigantesque décharge énergétique il y a 15 milliards d’années et il s’est mis à gonfler comme une bulle en se refroidissant. Des particules sont alors apparues (Quarks, protons, électrons, puis atomes et molécules simples). La matière s’est ensuite agglomérée en étoiles, planètes, galaxies dans un univers qui poursuit toujours son expansion.
Sur notre planète, il y a 4milliards d’années, la vie prend naissance lorsque les conditions lui furent favorables nous disent les biologistes: Dans la «soupe primitive», après un long processus de mûrissement des petits groupements de molécules carbonées acquièrent la faculté de se nourrir et de se répliquer. Bientôt ce sont des bactéries qui peu à peu colonisent les océans; puis des unicellulaires plus organisés apparaissent, ensuite des algues et de petits animaux prolifèrent.
Quand la vie devient foisonnante la sélection naturelle entre en jeu: Les êtres les mieux adaptés survivent restant semblables à eux-mêmes, d’autres disparaissent, beaucoup évoluent lentement, à leur façon au fil des générations. Petit à petit animaux et végétaux s’approchent des rivages, apprennent à vivre sur la terre ferme et se diversifient au cours des ères géologiques. Très longue histoire….
Il y a 7 millions d’années apparaissent en Afrique des petits mammifères velus et craintifs qui grimpent aux arbres au moindre danger. Ce sont nos ancêtres avec deux mains et un cerveau relativement plus gros que celui des autres animaux. Au fil des millénaires ils se redressent, se différencient des autres singes, fabriquent des outils, s’organisent en groupes pour chasser. Dans le même temps, leur cerveau prend du volume. Ils apprennent à communiquer entre eux par le langage, à domestiquer le feu.
L’Homo devient Sapiens il y a 200 000 ans et peu à peu conquiert le monde.
Ce prodigieux développement de la vie depuis sa naissance jusqu’au monde actuel n’est plus une hypothèse mais une réalité objective, un acquis longuement élaboré de la science du 20ème siècle, un phénomène complexe certes mais incontestable.
Soulignons 2 caractéristiques essentielles de L’Évolution:
a) L’ÉVOLUTION EST UN PROCESSUS QUI S’ORGANISE SUR LE LONG TERME.
L’évolution n’est pas perceptible à notre échelle humaine, même historique, même préhistorique ce qui explique que la théorie ait mis si longtemps à s’imposer. Mais à l’échelle de l’immensité des temps géologiques tout devient différent. Le phénomène est extrêmement lent, inlassable, laborieux.
Au fil du renouvellement perpétuel des générations, du brassage des gènes, de l’adaptation constante au milieu et aux conditions de vie qui changent, les espèces animales et végétales se modifient par petites secousses mutatives et se diversifient en lignées différentes.
Avec le temps les résultats sont prodigieux.
Un seul exemple pour illustrer: Tous les mammifères actuels descendent d’un petit insectivore de la taille d’un rat qui vivait à l’ère secondaire! Quel chemin parcouru….
b) L’ÉVOLUTION SE FAIT DANS LE SENS DE LA COMPLEXIFICATION.
Observons dans un musée ou sur des planches illustrées les reconstitutions des êtres vivants au cours du temps: Les premières formes de vie sont microscopiques avec une structure très simple. Puis les organismes se font plus volumineux avec une anatomie plus complexe:
On voit apparaître des yeux, des tentacules, des nageoires donc des muscles, des branchies, des neurones qui commandent la structure….
Chez les mammifères et particulièrement les primates, c’est le système nerveux qui prend du volume et devient plus performant. L’intelligence se développe avec l’émergence chez l’homme d’une conscience élaborée.
L’évolution est une marche en avant vers toujours plus de complexité, d’organisation, d’adaptation au milieu, de spécialisation des organismes, donc une PROGRESSION.
L’homme est la forme la plus achevée actuellement d’une très longue maturation de la «matière- énergie» puis d’une lente évolution de la vie.
Résumons par 3 tableaux cet extraordinaire déroulement des choses (d’après Hubert Reeves)
Nous sommes devant des faits troublants autant que prodigieux:
De la bactérie microscopique nous passons par étapes à des êtres vivants dont la variété infinie, la finesse d’organisation et d’adaptation au milieu, l’harmonie des formes nous confondent; qui n’est pas émerveillé devant le spectacle de la nature?
Et, avec l’homme la matière se met à penser! Comment cela peut-il se faire?…
Le temps bien sûr: 4 milliards d’années. Ne dit-on pas que «le temps accomplit des miracles»?
Les mutations nous disent les biologistes qui sont fréquentes et se font «au hasard».
Mais, curieusement, parmi les mutations multiples que subit le vivant, seules celles qui sont favorables à la lignée sont conservées:
«La nature a su créer des structures biochimiques qui permettent de retenir ses bons coups et d’ignorer ses bavures. Bien sûr Dieu joue aux dés. Mais il ne retient que les coups gagnants.» (Hubert Reeves)
Donc en toute logique, nous pouvons affirmer que l’évolution est orientée, que le «hasard» de l’évolution est dirigé vers le plus performant, le plus adapté, le plus prolifique, le plus esthétique, et pour l’homme le plus intelligent, le plus beau.
Il y a, en toute évidence dans l’univers une intention, une volonté de progrès, une finalité donc une PUISSANCE ORGANISATRICE qui régente le monde.
«Qu’il y ait des substances immatérielles et intelligentes c’est de quoi je ne doute pas… Je n’affirme rien; je me contente de croire qu’il y a plus de choses possibles qu’on ne pense… Produire sans intelligences des êtres qui en ont! Cela est-il concevable?» (Voltaire)
4) CONVICTIONS PERSONNELLES.
L’idée est aussi vieille que l’humanité: Dès que son intelligence le lui a permis, l’homme a observé le monde, levé les yeux vers le ciel et a eu l’intuition de l’existence de puissances supérieures occultes. Ainsi sont nés les dieux, se sont établies les religions avec chacune sa mythologie.
La Science seule nous apporte la connaissance fiable et objective de la réalité. Actuellement, sans mettre en cause les certitudes acquises, elle reconnaît ses limites et s’interroge: «Dans la nature existent des forces qui échappent à nos sens. Je pense qu’il y a quelque chose au-delà de la réalité; mais quelle est cette chose?» (Hubert Reeves)
Il est légitime d’émettre quelques hypothèses plausibles.
a) CARACTÉRISTIQUES DE LA PUISSANCE ORGANISATRICE.
Son existence étant reconnue, essayons avec les faibles possibilités de notre esprit d’analyser cette entité supérieure primordiale.
Remarquons tout d’abord son insuffisance à nos yeux:
Ce n’est pas une puissance souveraine qui dirige harmonieusement le monde puisqu’elle est indifférente aux cataclysmes naturels, aux guerres et aux épidémies les plus terribles, aux pires horreurs. Elle ignore les faibles et laisse prospérer la canaille. Elle semble très au-dessus de nos têtes, nous laisse nous débrouiller seul, ne se préoccupant apparemment pas du cas individuel.
«Qu’importe qu’il y ait du bien ou du mal sur la Terre! Quand sa Hauteur envoie un vaisseau en Égypte, s’embarrasse t-elle si les souris qui sont dans le vaisseau sont à leur aise ou non?» grogne le Derviche de Turquie. (Voltaire)
C’est une puissance globale, intemporelle, immatérielle, immuable, d’essence spirituelle qui imprègne l’univers dans son ensemble et l’oriente dans le sens de l’organisation, de la progression.
Son influence favorisante, diffuse, permanente est certainement liée à l’écoulement imperturbable du temps.
Au niveau des êtres vivants son action devient perceptible concrètement par la toute puissance des instincts qui assurent la continuité de la chaîne des vivants.
Avec l’homme en plus émerge une voix intérieure, secrète et souveraine: La Conscience qui juge et qui nous indique tout bonnement le «Droit Chemin».
b) LA CONSCIENCE; L’ORDRE MORAL.
La Conscience nous permet de connaître les intentions de l’Esprit Universel:
Ne pas céder aveuglément aux instincts, agir courageusement, ordonnément, nous conduire «en conscience» en respectant les autres, dans le sens de la solidarité, de la justice, de l’altruisme.
«Tu aimeras ton prochain comme toi-même» dit le Dieu des chrétiens.
Son action organisatrice est donc morale, bienfaisante, orientée en vue d’établir un monde meilleur.
Écoutons J. J. Rousseau: «Il est donc au fond des âmes un principe inné de justice et de vertu, sur lequel, malgré nos propres maximes, nous jugeons nos actions et celles d’autrui comme bonnes ou mauvaises; et c’est à ce principe que je donne le nom de conscience… Conscience! Conscience! Instinct divin, immortelle et céleste voix, guide assuré d’un être ignorant et borné, mais intelligent et libre, juge infaillible du bien et du mal…»
La conscience n’a rien de la violence naturelle des instincts mais son action intérieure, permanente n’en est pas moins forte: Elle accuse le fautif: «L’œil était dans la tombe et regardait Caïn» (Victor Hugo).
Au contraire Montaigne souligne «la fierté généreuse qui accompagne la bonne conscience, seul paiement qui jamais ne nous manque».
Encore faut-il savoir l’entendre et «vivre en accord avec sa conscience».
Rousseau encore: «Le grand remède aux misères de ce monde c’est l’absorption dans l’état présent… et pour cela il faut boire l’eau d’oubli, se mettre dans l’état d’un homme qui commence à vivre».
Donc il faut de temps en temps s’isoler du quotidien, se recueillir humblement, méditer longuement, se mettre à l’écoute de l’univers…
« Retourne en toi ; la vérité habite en l’homme intérieur. » (Saint Augustin).
c) L’AVENIR DE L’HOMME.
Au niveau individuel nous mourrons; restera-t-il une trace à part un souvenir ému chez nos enfants? Pourquoi pas? Les atomes de notre corps subsistent.
Quant à l’esprit individuel que savons-nous de lui? Rien mis à part son existence.
«Naître, vivre et passer c’est changer de forme» affirme Diderot.
Il est permis d’espérer:
«Est-ce qu’au chevet de l’être aimé que la mort vient de frapper vous ne sentez pas au-dedans de vous quelque chose qui vous crie que l’âme est immortelle? C’est insulter au cœur de l’homme que de dire avec le matérialisme: La mort c’est le néant» (Pasteur).
Pour l’instant notre ignorance reste entière.
Quant à l’espèce humaine, nous connaissons les dangers qui la menacent mais faisons lui confiance:
Malgré les troubles ici et là, l’organisation des États se consolide, la civilisation qui devient mondiale progresse tout de même et la connaissance, facteur essentiel de progrès s’accroît. L’instruction se généralise, les chercheurs sont de plus en plus nombreux, en relation permanente entre eux et la Science avance à pas de géant dans tous les domaines:
Astronomie, physique, biologie… Nous sommes à l’aube de découvertes qui vont bouleverser le monde:
Il est probable que les biologistes en manipulant les gènes pourront activer l’évolution dans le sens naturel de la spiritualisation et contribuer à faire apparaître un nouvel «homme» au cerveau plus élaboré, donc plus conscient, plus intelligent, plus raisonnable et ouvert aux autres, plus apte à déchiffrer les énigmes de l’univers.
Il est logique de penser que la Science dévoilera la puissance qui régente le monde et découvrira son mode d’action. (L’homme sait depuis la nuit des temps que «cette chose» existe).
Ce sera la nouvelle Renaissance: L’homme pourra entrer en contact avec la conscience universelle, orienter peut-être et multiplier son action bénéfique, la faire intervenir directement sur l’humanité pour éviter les guerres, prévenir les catastrophes naturelles et ponctuellement améliorer la vie de chacun…
On peut rêver d’un monde moins rude, protégé, plus harmonieux, accordé aux puissances spirituelles, en attendant que l’évolution mène plus loin l’humanité en une finalité dont les objectifs nous dépassent totalement…
Un horizon nouveau aux perspectives immenses s’ouvrira à la connaissance de l’homme.
«Patience dans l’azur» nous dit Hubert Reeves. Bien sûr il faudra du temps!
«Je crois aux forces de l’esprit» (Mitterand).
«L’esprit est une réalité invisible qui réside dans le monde matériel et s’étend au-delà de lui; l’esprit est la plus colossale puissance de ce monde.» (Alexis Carrel).
«Quelque chose existe au-delà du cercle qui limite notre vue: Quelque chose où nous émergerons» (Teilhard de Chardin).
Soyons persévérants et cherchons.
René Lavernhe
Auteur du livre: « Connaissance de soi par la symbolique de l’homme triangle »
Editions Castelli – Mars 2015
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